27 mai 2007

Une liaison, purement et simplement

A l'approche de la quarantaine, So-Hyun, bourgeoise de Séoul, mère de famille tranquille, s'éprend du fiancé de sa petite soeur, et réciproquement. A un rythme paisible, à travers les séquences courtes d'"Une liaison", Je-Yong Lee dépeint le lent trajet de cette femme (la hiératique Mi-Sook Lee) vers la liberté.

Comme le constate sa jeune soeur à un tristounet dîner d'anniversaire, So-Hyun, alias Mi-Sook Lee, a 39 ans, un mari architecte, souvent absent, un garçon de 11 ans, un grand appartement design à Séoul, et une collection de fossiles (7, pour 7 anniversaires). Elle va devoir accueillir et guider Woo-In, le fiancé de sa soeur Ji-Hyun de retour d'Amérique pour le mariage. Ji-Hyun est elle-même restée là-bas. Erreur.

La femme mariée et le jeune homme romantique vont parcourir Séoul, sa campagne, sa banlieue (c'est un mini road-movie), et, sans cris, sans éclats, tomber passionnément amoureux l'un de l'autre, d'où escales répétées dans une chambre avec vue sur jardin. Ca pourrait être le non-scénario d'un film français, mais non... Je-Yong Lee fait le choix de multiples et courtes séquences, autant d'esquisses, de croquis de lieux, de conversations, d'états d'âme rarement exprimés et tellement évidents. Il n'a pas peur d'introduire ou conclure ces brèves scènes par un cadrage vide, une chambre, un mur, un jardin, un paysage, reflétant ainsi l'ample respiration qui baigne les personnages et le film.

Tout cela se déroule dans une Corée très occidentalisée, avec ici ou là un élément contextuel marquant : l'appartement du père malade, où l'on vit encore au niveau du sol, l'exercice d'alerte aérienne... les sirènes sonnent, un civil avec brassard s'agite... les passants se ruent vers un abri.

Au comble du bouleversement, Mi-Sook Lee concède au spectateur un visage baissé, masqué par une impertinente mèche de cheveux. Ce pourrait être insupportable, et c'est tout simplement beau. Car la sobriété baigne l'oeuvre, à l'image de son titre tout simple : "Jung sa", "Une liaison". Réduite à son essence, à son irrésistible force d'attraction.

La hiératique mais humble héroïne trouve peu à peu en elle le goût d'une autre vie. Elle est aidée en cela par un beau monologue de son amant, énoncé dans le cadre décalé du labo de chimie d'un collège, après une étreinte sauvage et la perspective d'une irrémédiable séparation :

"C'est bête. Vous allez vieillir. Personne ne vous remarquera. Vous allez vieillir et mourir. Vous tomberez malade. Personne ne vous parlera d'amour. Jamais plus vous ne pourrez prononcer ce mot".

Tout est dit.

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